Le monde dans ma tartine… en Colombie
Qui n’a pas rêvé d’ouvrir ses volets sur un nouveau paysage ? D’accueillir chaque lever du jour autour d’un petit déjeuner qui n’appartient qu’au lieu visité. Voici une collection de petits déjeuners à travers le monde autour de l’assiette, du bol, de la timbale… Autant d’instantanés livrant des parfums, des couleurs et des cultures.
Impatients, les rideaux en crochet s’agitent subtilement comme une invitation à ouvrir les volets. Ils n’aiment pas rater le lever du jour. Dehors, la nature s’éveille dans le chant d’un concerto pour oiseaux et insectes. Au cœur du fameux triangle d’or noir de la Colombie, la brume enveloppe les plantations de café et de bananes de Quindío. Son paysage est une encre de chine éphémère à la beauté mystérieuse. Bientôt, ce fumato sera balayé par des couleurs vives sous les rayons du soleil brûlant. La Finca Villa Nora, ancienne ferme transformée en chambre d’hôte, invite à la contemplation de ce tableau, voire à une certaine paresse. Son hamac dérouterait presque du petit déjeuner… Il a pourtant de quoi charmer. La table déroule une frugalité locale au milieu des battements d’ailes de colibris. Au menu : jus de fruit de la passion et zapote, un fruit à la chair charnue, sucrée et presque crémeuse. Le café, sonnant comme une évidence dans la région, provoque ce jour-là bien des embarras de politesse, certains palais lui préférant le thé cher à la reine d’Angleterre. On s’en excuse, le rouge aux joues, tout en regrettant à cet instant les hauts plateaux du Sri Lanka…
Un café, What else ?
Cette idée est vite chassée. La campagne, à la sublime végétation luxuriante, défile dans les soubresauts de la Jeep Willys. Les plants de café s’accrochent aux reliefs montagneux les plus escarpés. Visite des champs à perte de vue, halte dans les coopératives et initiation à la caféiculture. Partout, l’arôme corsé règne en maître. Dans les villes et villages, à chaque coin de rue, on boit le tinto, un café très allongé et sucré, réalisé à partir de grains de moindre qualité. Le tinto serait le socle de la convivialité de la Colombie, accompagnant sourires et rires. À défaut d’y lire le futur dans son marc, on y découvre le cœur du pays, aussi généreux que ses paysages.
Rythmes chaloupés
Changement d’ambiance dans le nord du pays où l’esprit des Caraïbes inspira tant Gabriel García Márquez. La mythique Carthagène décline son ambiance de bord de mer et de port tout en technicolor. Ses maisons rivalisent de jaune, bleu, rose… Il flotte un air de vacances à longueur d’année. Le soir venu, les habitants disputent des parties de domino sur les pas des portes, sortent leur sono sur le trottoir ou emmènent leurs canaris à un concours de chant. Tout n’est que prétexte à la fête sur des notes de salsa, vallenato, cumbia, merengue, champeta, papayera… Au coin d’une rue, on tend l’oreille, croyant reconnaître Tchaïkovski. Ses gammes s’échappent insolemment d’une fenêtre. C’est l’école de danse nous dit-on. Carthagène est décidément un joyeux mixte de cultures. Le passé colonial se lit dans les visages et sur les façades dont celles de l’hôtel Sofitel Legend Santa Clara Cartagena, ancien couvent du XVIIe siècle. Là, loin de la région du café où les grains sont rois, on y prend sans gêne aucune un petit déjeuner accompagné d’un thé.