«Accor ne peut à lui seul lutter contre les effets du surtourisme»
À l’occasion de la Journée internationale du tourisme, Accor annonce son association avec World Monuments Fund. Brune Poirson, directrice du développement durable du groupe hôtelier français, met en avant l’importance d’un tourisme ancré dans les territoires.
En cette Journée internationale du tourisme, célébrée chaque 27 septembre, le groupe hôtelier français Accor annonce un partenariat significatif avec le World Monuments Fund (WMF). Pendant trois ans, cette collaboration ambitionne de protéger le patrimoine culturel tout en promouvant des pratiques de tourisme durable essentielles aux communautés locales.
Accor, acteur majeur dans le secteur de l’hospitalité mondiale avec plus de 5.700 établissements à travers le monde, entend utiliser son poids pour préserver les trésors culturels menacés. Ce partenariat s’appuiera sur l’expertise du WMF pour mettre en œuvre des projets concrets, renforçant ainsi les liens entre les hôtels et les collectivités. Depuis 1996, cette organisation non gouvernementale internationale et indépendante se consacre à la sauvegarde des sites du patrimoine culturel mondial en péril. À ce jour, plus de 800 sites dans 135 pays ont bénéficié de son soutien, contribuant à leur conservation et, dans certains cas, à leur réhabilitation complète.
De New York, où elle assiste à la Climate Week 2024, Brune Poirson précise que «cette initiative s’inscrit au cœur de la stratégie de développement durable du groupe. Elle confie au Figaro : Nous avons l’ambition de faire des hôtels du groupe de véritables acteurs ancrés sur leur territoire». Le tourisme, pilier de l’économie mondiale, représente jusqu’à 10 % du PIB global et génère environ 10 % des emplois dans le monde. Toutefois, il fait face à des défis de taille, notamment le changement climatique et le surtourisme, qui menacent la richesse patrimoniale des territoires. «En s’associant au WMF, Accor entend adopter des pratiques innovantes et durables pour faire face à ces enjeux. Il est clé que le secteur privé participe à les rendre plus résilients», ajoute-t-elle, insistant sur l’urgence d’une approche collaborative.
Des projets concrets pour un tourisme responsable
Au cours des trois prochaines années, Accor et le WMF uniront leurs ressources et expertises pour développer des projets de préservation, dont les détails ne sont pas encore révélés. Ces initiatives viseront à former les communautés locales et à collaborer étroitement avec les autorités pour encourager un tourisme responsable, atténuant ainsi les effets néfastes du tourisme de masse. Brune Poirson souligne que «le groupe aura une certaine latitude pour financer des projets spécifiques correspondant à ses zones d’opération», maximisant ainsi leur impact.
L’un des objectifs majeurs consiste à promouvoir une répartition équilibrée des flux touristiques. Cela impliquera de mettre en avant des monuments et des sites patrimoniaux moins connus, souvent laissés de côté dans les circuits traditionnels. Accor s’engage donc à valoriser ces destinations tout en respectant l’héritage culturel de chaque lieu. L’ancienne secrétaire d’État, dont le nom est lié à une loi antigaspillage pour une économie circulaire, rappelle également que «l’objectif est d’être force de proposition pour les populations et territoires qui font face à ces enjeux».
Vers de nouvelles normes en matière de tourisme durable
Pour Sébastien Bazin, PDG d’Accor, «cette collaboration a aussi pour ambition de faire émerger de nouvelles initiatives au service d’un développement durable et responsable du secteur du voyage». Toutefois, concernant les nouvelles normes à venir, il va falloir patienter un peu. Brune Poirson indique que «le WMF annoncera en janvier 2025 les projets soutenus lors de la prochaine édition de son programme Watch », et qu’Accor fournira ensuite des précisions sur les projets retenus.
En évoquant les nouvelles destinations axées sur un développement réfléchi et durable, elle cite des lieux comme Barcelone, qui subissent une pression considérable en haute saison, pouvant accueillir jusqu’à dix fois leur population. «Nous menons donc des réflexions en interne pour évaluer les projets de développement afin de réduire au maximum, avant leur ouverture, l’impact qu’ils pourront avoir sur les territoires, renchérit-elle. Nous sommes également en lien avec des organisations qui facilitent le dialogue public-privé sur les enjeux de tourisme.»
Une vision durable pour l’avenir
Accor agit déjà dans des territoires moins fréquentés, avec des projets d’ouverture dans des régions jusqu’ici délaissées par le grand public. Toutefois, Brune Poirson insiste sur la nécessité d’intensifier « le travail de collaboration trans-sectorielle » pour promouvoir un développement hôtelier et touristique durable. Enfin, elle fait valoir que «le groupe Accor ne peut à lui seul lutter contre les effets du surtourisme», et que des partenariats locaux avec une vision commune des enjeux sont indispensables.
En conjuguant leurs forces, Accor et le WMF s’engagent donc à transformer le secteur du tourisme en un modèle de durabilité, en soutenant le patrimoine culturel et les communautés locales. Trois ans seront-ils suffisants ? L’enjeu est fondamental à l’ère du tourisme moderne.