Les sandales des Allemands, la grossièreté des Russes… D’où vient la (mauvaise) réputation des touristes ?


À chaque nationalité, son lot de clichés… Plus ou moins justifié. Passage en revue des plus connus d’entre eux avec Laurent Tissot, historien spécialiste du tourisme et professeur émérite à l’université de Neuchâtel, en Suisse.

«Les Allemands voyagent toujours en chaussettes-sandales»

On résume souvent le touriste allemand à son look, et à un détail en particulier : la chaussette dans les souliers ouverts. Une faute de goût que l’on fait remonter à la création, en 1774, des Birkenstock, ces chaussures quasi orthopédiques conçues pour être les plus confortables possibles. Un siècle plus tard, elles étaient adoptées par tous les Allemands, version avec ou sans chaussettes. Lorsque le voyage se démocratise, à la fin des années 1930, les touristes allemands exhibent fièrement leurs godillots. « Aujourd’hui, le stéréotype vise tous les pays du nord de l’Europe, de la péninsule Scandinave, au Danemark en passant par les Pays Bas », explique l’historien Laurent Tissot.

«Les Français sentent mauvais»

Sans mauvais jeu de mots, c’est le stéréotype qui nous colle le plus à la peau lorsque l’on voyage à l’étranger. Une réputation que l’on devrait en fait à Louis XIV et à sa cour. Et pour cause, le château de Versailles était paradoxalement l’endroit le moins propre du royaume. Les toilettes y étaient très sommaires et les bains plutôt rares. « À l’époque, on avait peur que l’eau transmette des maladies, raconte Laurent Tissot. On pensait à l’inverse, que la crasse protégeait ». Plutôt que de se laver, les nobles et le roi avaient donc pour habitude de s’asperger de parfum…

Autre raison qui justifie cette réputation selon le professionnel du tourisme : la France est le plus grand producteur agricole d’Europe selon une étude réalisée par Eurostat (office des statistiques de l’UE) en 2016. Or dans l’imaginaire de certains étrangers, notamment au nord de l’Europe, la gestion des champs et des animaux laisserait peu de place à l’hygiène…

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«Les Italiens sont séducteurs»

C’est un fait : nos voisins transalpins ont la réputation d’être de véritables séducteurs, tendance macho. « Question de culture ! », affirme le professeur. « L’homme italien est un être social. Et c’est bien souvent sur ce contact avec l’autre et sur l’attirance qu’il exerce auprès de ses pairs qu’il est considéré en société », explique Laurent Tissot. Plus il a de succès, plus il aura de crédit auprès des siens. De plus, « l’Italie est un pays très catholique et, pendant longtemps, le catholicisme n’a pas laissé beaucoup de place aux femmes », précise le spécialiste.

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«Les Anglais boivent trop»

Les Britanniques, eux, sont connus pour être de gros buveurs. À raison ? Selon plusieurs études scientifiques réalisées ces dernières années, ils feraient partie des plus gros consommateurs d’alcool du monde. Les premiers lieux de consommation, les tabernae, des tavernes qui proposaient le gîte et le couvert aux voyageurs, apparaissent sous l’empire romain et servent en majorité une boisson à base d’orge, sorte d’ancêtre de la bière. Très vite, ces lieux, Ale Houses, comme on les appelle ensuite au Moyen Âge, se développent dans toute l’Angleterre. Jusqu’à acquérir leurs lettres de noblesse en 1393 en devenant les pubs – abréviation de public house – lorsque le roi Richard II les contraint à se faire connaître au public par l’installation au-dessus de la porte d’entrée d’un signe distinctif – bâton, pièce de bois ou branche d’arbre. Le pub est une institution deux fois millénaire donc. Parmi les autres explications recensées par l’historien : la météo. « L’alcool permet d’oublier la météo maussade et le froid », explique l’historien. « C’est la raison pour laquelle ce cliché concerne également les Bretons ».

«Les Américains sont incultes»

Les États-Unis sont une machine à fantasmes et à stéréotypes. Parmi les plus coriaces : leur soi-disant manque de culture. Les Américains iraient jusqu’à penser que Londres est… la capitale de l’Espagne. « Il y a plusieurs explications à cela » décrit l’expert. « Tout d’abord, on date – grossièrement – le début de l’histoire des États-Unis à 1492, la découverte du continent par Christophe Colomb. Ce qui est très jeune comparé à la Grande-Bretagne ou à la France, par exemple. En réalité, l’histoire de l’Amérique commence par les premières migrations de peuplades venues d’Asie durant la Préhistoire, mais ces peuples ont vécu isolés du “Vieux Monde” jusqu’à son arrivée. »

Seconde raison qui justifie cette réputation à l’étranger, la taille du pays. Imaginez : les États-Unis sont vastes comme 17 fois la France. Pas étonnant qu’il faille un peu plus de temps pour s’intéresser à la géographie du monde entier lorsqu’on habite dans un pays de cette superficie. Last but not least, depuis la guerre froide et jusqu’à il y a une dizaine d’années, les États-Unis représentaient la seule surpuissance mondiale. Un titre qui a renforcé leur sentiment patriotique. Aux dépens parfois de l’intérêt que les Américains peuvent avoir pour d’autres pays. Le slogan « Make America Great Again » de Trump en est le parfait exemple.

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«Les Chinois ne connaissent pas les bonnes manières»

Vu de France ou plus globalement d’Europe, les Chinois ne sont pas connus pour leur raffinement. Réputés pour boire et manger bruyamment, pour péter, cracher et roter sans gêne en public, ils heurtent nos codes occidentaux. « Question de culture », ici aussi, selon le chercheur. « La Chine est restée très longtemps repliée sur elle-même. Cela fait à peine plus de vingt ans que le pays s’est ouvert et que ses habitants ont commencé à voyager. Ils ne connaissent donc pas toujours les codes des pays dans lesquels ils se rendent ». De plus, la plupart d’entre eux ne parlent pas ou peu anglais, ce qui peut freiner encore davantage leur intégration. Quoi qu’il en soit, le sujet est connu et préoccupe les dirigeants chinois. À plusieurs reprises ces dernières années, le gouvernement a même lancé des campagnes de publicité incitant les touristes à plus de politesse lorsqu’ils se rendent à l’étranger.

«Les Russes sont grossiers»

Le portrait est peu glorieux. « Bruyants, grossiers, asociaux et impolis », voilà les qualificatifs qui reviennent le plus souvent à propos de la clientèle russe, selon une étude de 2013 publiée par Zoomer, un site recensant les avis de voyageurs. « À ce stéréotype, il existe également une explication historique », selon le spécialiste du tourisme. « Comme la Chine, la Russie est restée très longtemps repliée sur elle-même. Ce n’est qu’après la chute du mur de Berlin que les Russes ont commencé à voyager en Europe et plus globalement en Occident. Avec un esprit quelque peu “revanchard”, une envie de rattraper le temps perdu, de surconsommation et d’arrogance. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle aujourd’hui, les oligarques russes sont souvent perçus par les étrangers comme des hommes d’affaires impressionnants, qui ne jurent que par des manteaux de fourrures extravagantes et des montres hors de prix. De manière générale, dans leur communication ordinaire, ils n’ont pas pour habitude de faire “semblant”. Lorsqu’ils sont mécontents, ils le font savoir. » Au risque de froisser quelque peu les professionnels qui les accueillent…

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