pourquoi les stations de ski ne débouchent pas encore le champagne pour cet hiver


INFO LE FIGARO – La précocité et la vigueur des réservations surprennent les professionnels. Malgré tout, la saison de sports d’hiver s’annonce stable selon les premières estimations. Les opérateurs doivent convaincre les vacanciers hésitants en raison de l’enneigement et de prix qui augmentent encore.  

Malgré les aléas climatiques ou les hausses de prix, le vacancier-skieur reste du genre décidé. Les opérateurs du tourisme en sont les premiers surpris mais, cette année encore, les réservations aux sports d’hiver battent des records de précocité. « À ce jour nous sommes en avance de 30% par rapport à la saison dernière, qui était déjà bonne», expose Thomas Saison, directeur de l’office de tourisme de la Grande Plagne.

La dynamique de la plus grande station d’Europe (57.200 lits) se vérifie dans les principaux massifs des Alpes du nord et du sud ou des Pyrénées, et à toutes les altitudes. «Les hébergeurs de montagne enregistrent une avance moyenne de 6,1% sur l’ensemble de la saison et des massifs», annonce au Figaro Denis Maurer, président de G2A Consulting, qui publie ce vendredi son étude annuelle, agrégeant sondage et données de 90% des lits disponibles en stations.


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Semaine du jour de l’an complète

Ce départ au sprint est le fait d’une clientèle captive. «Les habitués du ski sont plus engagés que la moyenne des vacanciers, beaucoup ont déjà réservé leurs séjours. Et ce, malgré des prix en hausse puisque 80% d’entre eux ont prévu un budget supérieur à l’an dernier », poursuit Denis Maurer. Le profil «skieur» de ces vacanciers se confirme auprès des écoles de ski : «Nous avons déjà vendu en ligne 30% de cours supplémentaires», dévoile Eric Brèche, le président de l’ESF.

« Le poids de la clientèle étrangère, moins sensible au prix est également important avec une volonté de sécuriser un séjour et de réserver les moyens de transport », complète Gilles Léonard, directeur de Méribel Tourisme. La station de l’immense domaine des 3-Vallées (Savoie) affiche d’ores et déjà «un taux de remplissage de 98% pour la semaine du Nouvel an».

Tout l’enjeu va maintenant consister à garder le rythme et convaincre les clients de passer à l’acte. Car si les professionnels se gardent de déboucher le champagne, il y a une bonne raison : l’atterrissage prévu en fin de saison est tout juste positif, à +0,7% de fréquentation prévoit G2A. Un grand écart qui traduit un certain nombre de déséquilibres et autant de défis pour les opérateurs.

La nouvelle télécabine de Côte Brune, à Méribel, sera l’un des gros investissements de l’hiver pour améliorer encore les liaisons depuis le cœur des 3-Vallées.
S3V

Janvier, tube de l’hiver

À commencer par le calendrier. L’avance se concentre sur des périodes bien précises. «Les vacances de Noël sont dynamiques et les grands appartements ou chalets partent en premier pour le nouvel an et les deux semaines multizones du 14 au 28 février», résume Johanna Ambil, directrice générale d’Odalys Vacances, qui dispose de 45 résidences dans 35 stations, et ouvre une nouvelle unité en fin d’année à la Rosière (Savoie). Et janvier, une nouvelle fois, bat des records. «C’est devenu un mois prisé de la clientèle anglaise et surtout française», constate Sylvie Joly, directrice générale adjointe chez MMV, qui compte des villages clubs dans 17 stations et inaugure 700 lits cet hiver à Serre-Chevalier (Hautes-Alpes). « Il y a un glissement de la clientèle française de février vers janvier, pour des raisons de prix essentiellement, et parce que janvier est perçu comme un bon mois pour l’enneigement, plus que le printemps », appuie Denis Maurer.

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Moins de circulation, moins de bouchons… Les arguments convainquent certains Français, qui représentent encore 70% de la clientèle des sports d’hiver et des 67 millions de nuitées annuelles. «On voit des familles avec enfants qui ratent l’école pour profiter de prix plus doux», glisse Thomas Saison (La Plagne). Selon G2A, le volume de nuitées en janvier a gonflé de 12,5% dans les stations de moyenne de montagne entre 2019 et 2025, et de presque 20% dans les spots d’altitude comme Tignes, Val d’Isère ou Méribel. L’anticipation est devenue la règle pour les habitués des sommets. «J’ai déjà des réservations de tables midi ou soir », s’étonne Annie Campoye, propriétaire depuis 30 ans du restaurant d’altitude Super Megève, dans la chic station de Haute-Savoie.


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Mais en dehors de ces périodes fastes, les trous d’air calendaires se multiplient. Le début de saison est traditionnellement difficile et très dépendant des flocons. «On travaille à étoffer nos calendriers événementiels pour donner envie aux gens de venir», indique Gilles Léonard, qui relance à Méribel une ouverture «festive» le 6 décembre, à l’image des voisins de Tarentaise Val Thorens et Tignes, qui inaugurent en musique et animations la saison dès le 23 novembre.

Les courts séjours et le paiement fractionné séduisent les néo-réservants

Cécile Revol, directrice générale de Sunweb France

Printemps anémié

La dernière semaine des vacances de février, avec la seule zone parisienne «off» jusqu’au 8 mars, est en recul marqué. Les réservations s’érodent de 5,5%, avec un repli plus prononcé dans les Pyrénées en raison des craintes sur l’enneigement, tandis que les augmentations de prix atteignent des niveaux stratosphériques: +81% pour une nuit dans un hôtel 4 étoiles cette année comparé à 2019, illustre G2A. Mais c’est surtout le printemps qui manque de souffle. Les ventes anémiques de ces dernières années sont dans tous les esprits. «Les dernières semaines de mars surtout deviennent une gageure, il faut réussir à replacer la montagne dans l’esprit des vacanciers», prône Marlène Giacometti, directrice de l’office de tourisme et de la centrale de réservation des Menuires (Savoie).

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Jean-Luc Boch, président de l’Association nationale des maires de station de montagne (ANMSM) et de France Montagnes, l’organisme de promotion du secteur, en convient. « Je comprends que les prix de haute saison fassent hésiter les Français même si notre pays demeure l’un des moins chers pour le ski. Mais il faut rappeler que les conditions de neige sont excellentes au printemps et les tarifs plus doux», appuie-t-il. «C’est pourquoi nous prévoyons cette année une grande opération de printemps associant remontées mécaniques et socio professionnels pour proposer des remises et offres spéciales, pour les forfaits ou hébergements par exemple», annonce l’élu.

Les Gets, en Haute-Savoie, ont déjà pris les devants. La station-village raccordée à l’immense domaine des Portes du Soleil (Avoriaz, Morzine…) inaugure une semaine de ski à «prix imbattable» pour les adultes débutants du 21 au 28 mars. «Le pack semaine de 399 € inclut forfait, location de matériel, cours de ski, animations et activités en soirée. L’intérêt est d’attirer de nouvelles clientèles et faire découvrir notre station qui propose certes du ski mais aussi beaucoup d’autres choses», décrypte Benjamin Mugnier, le directeur exécutif de la station. Même approche pour Laurent Garcia, directeur de la station de Peyragudes, dans les Pyrénées : «Le ski sera gratuit pour les moins de 18 ans du 20 au 30 mars».

Paiement fractionné

Nantis d’une belle avance sur les réservations, les opérateurs doivent innover. «Notre avance de 50% au printemps s’explique à la fois par des courts séjours et une offre large de stations, dont les plus abordables comme Les Sybelles en Savoie ou Superdévoluy dans les Hautes-Alpes, figurent dans notre top 5 des ventes», argumente Cécile Revol. La directrice générale France du tour-opérateur Sunweb tente de sortir des concepts figés du ski, à l’image de la réservation à la semaine du samedi au samedi. «Nous proposons des formules plus souples grâce aux hôtels, avec des séjours du lundi au vendredi ou du dimanche au jeudi.»


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Cela semble susciter de l’intérêt auprès de clients qui avaient déserté les cimes. «54% des néo réservants n’avaient pas consommé chez nous depuis 3 ans», se réjouit-elle. Le succès du paiement fractionné, encore peu répandu au ski, témoigne aussi des tensions sur le pouvoir d’achat. « Le paiement en quatre fois avec frais séduit et ce sera un argument pour convaincre une clientèle de dernière minute qui va avoir beaucoup d’importance.»

«Expérience skieur»

Mais il reste difficile d’activer le levier prix selon les professionnels. «Structurellement tous nos postes de dépenses sont en hausse : énergie, blanchisserie… Je pense sincèrement qu’avec une augmentation moyenne de 3% de nos tarifs, nous sommes raisonnables», défend Sylvie Joly (MMV). Du côté des forfaits de ski, deux domaines XXL savoyards franchissent désormais la barre psychologique des 400 € la semaine adulte en haute saison : après Tignes-Val d’Isère (450 €), les 3-Vallées atteignent 409 € cet hiver. Certes, le prix réel sera inférieur par le jeu des remises, par exemple le forfait famille. Mais cela commence à faire beaucoup. «L’augmentation moyenne des forfaits en France ne sera que de 3% pas beaucoup plus que l’inflation», assure Anne Marty, présidente de domaine skiable de France (DSF) qui représente les exploitants de remontées.

«Il faut mettre ce prix en adéquation avec les investissements massifs consentis pour améliorer les remontées mécaniques et l’expérience skieur», embraye Sébastien Mérignargues, directeur de l’office de tourisme de l’Alpe d’Huez. La Sata, gestionnaire de la grande station de l’Oisans, met la main à la poche pour moderniser les remontées et flécher les skieurs vers les sommets de la station, qui culmine à 3300 m. Cette course aux armements, «nécessaire pour sauvegarder l’activité ski et financer les transitions», rappelle-t-il, a un prix et une contrepartie : des domaines skiables mieux aménagés et plus ludiques et un temps d’attente toujours réduit y compris dans les périodes de forte fréquentation. Quitte à lancer des options coupe-file aux télésièges, comme c’est le cas en Savoie aux Arcs (Savoie), ou depuis l’an dernier à Serre-Chevalier.


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