ce qui surprend les professionnels cette année
Les premières pistes de ski ouvrent dans un mois et la période de Toussaint est un round de réservation important pour les vacances aux sports d’hiver. Des tendances se dessinent déjà.
Ce n’est qu’une première tendance, mais elle est encourageante aux yeux des professionnels des sports d’hiver. À un mois de l’ouverture des premières pistes en Savoie –Tignes et Val Thorens démarrent leurs remontées le 25 novembre– le monde de la montagne passe au révélateur des vacances de la Toussaint. Ce premier gros round de réservation démarre avec une légère avance de 0,7% par rapport à la même période l’an dernier. Les skieurs sont pour le moment au rendez-vous, malgré une hausse moyenne des prix des forfaits de l’ordre « de 6 à 7% en raison notamment des coûts de l’énergie », contextualisait Jean-Luc Boch, président de l’Association nationale des maires des stations de montagne (ANMSM), lors d’une récente rencontre avec la presse.
Le détail des données traduit les différents phénomènes à l’œuvre dans le secteur et chez les consommateurs, de l’attrition du pouvoir d’achat aux réflexions sur les dérèglements climatiques qui, cet hiver, abrégeront l’activité ski à Puigmal (Pyrénées) et La Sambuy (Savoie). Les Alpes du nord et les Pyrénées ont souffert du manque d’enneigement l’hiver dernier, marqué par une période de sécheresse historique. Et pour la deuxième année consécutive, Tignes et Les Deux-Alpes font l’impasse sur l’ouverture du ski sur glacier à la Toussaint, les températures mettant au supplice les géants des Alpes.
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Des parents prêts à faire manquer l’école
À ce jour les grands domaines d’altitude (dont les pistes sont majoritairement tracées au-dessus de 1850 m) enregistrent une avance moyenne de +4% toutes périodes confondues, tandis que les autres stations sont en repli de 3,5%, selon les données de l’institut G2A, qui nourrit notamment l’Observatoire National des Stations de Montagne (OSM). « Nous sommes même au-delà avec à ce jour une avance de 8,6% », témoigne Marlène Giacometti, directrice de l’Office de tourisme des Menuires (Savoie). Pas forcément une surprise, mais elle perçoit de nouvelles motivations. « Les amoureux du ski dont le pouvoir d’achat est préservé sécurisent leur activité en misant sur les domaines où l’enneigement sera garanti. Je pense que le manque de flocons de l’hiver dernier est encore dans les esprits, et que le risque du réchauffement pour l’activité ski est pris en compte ».
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La station des 3-Vallées voit aussi la demande affluer depuis les marchés étrangers avec une constante : 85% des clients optent pour un forfait de l’immense domaine skiable (650 km de pistes) plutôt que pour la seule station. Et comme l’an dernier, la période de janvier, moins onéreuse, attire davantage que les dernières saisons. «L’hiver 2023, nous avons constaté que des parents n’avaient pas hésité à faire manquer l’école aux enfants pour skier à cette période», relève Denis Maurer, président de G2A. «40 % l’envisageraient cette année.» Autre indice à suivre selon lui : le choix d’un forfait 4 jours au lieu de 6 pour réaliser des économies.
Dans les autres spots haut perchés, le constat est identique : les skieurs résolus sont au rendez-vous et anticipent. « Nous sommes en avance et on peut dire que la clientèle amatrice de grand ski est pour le moment au rendez-vous », appuie Frédéric Porte, directeur général de Tignes Développement. Il y voit aussi la récompense des « efforts d’investissement pour développer l’expérience de nos clients en station, ainsi que le calendrier festif et d’événements. »
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«Les prix sont excessifs »
Aux Deux-Alpes (Isère), qui inaugure cet hiver un nouvel espace débutant à 2100 m sur la zone dite de la Vallée blanche, l’avance est de l’ordre « de 6% ». Dans les Pyrénées, Font-Romeu-Pyrénées 2000, qui sera la première station du massif à ouvrir ses pistes le 1er décembre, enregistre aussi un bond de la demande. « Nous sommes à + 20% et je pense que nous profitons aussi d’une politique de prix favorable avec des offres early », confie Jacques Alvarez, directeur du spot des Pyrénées Orientales exploité par le groupe Altiservice.
Là encore une constante : une ouverture des pistes et un ski garantis, en l’espèce par plus de 500 enneigeurs couvrant 90% du domaine d’une quarantaine de km. Et un investissement conséquent qui voit le jour cet hiver. De nouvelles télécabines de 10 places entrent en exploitation le 20 décembre. Elles remplacent les antiques « œufs » de 6 places au départ du centre-ville de Font Romeu (1775 m) pour transporter les touristes jusqu’à 1964 m en moins de 5 minutes.
Mais la prudence reste de mise. Si le calendrier est plutôt favorable cette année avec notamment des jours de Noël et de l’An qui tombent un lundi, la semaine « haute » du 17 février, considérée comme la plus rentable, subit un creux. La raison ? « Les prix, des hébergements notamment, sont excessifs, les professionnels doivent revenir à la raison », s’agace un observateur. La période d’avril, avec des vacances de printemps démarrant tôt, est également en retrait. « Ce sera sûrement l’un des bons plans à conseiller cette année : les prix seront plus doux et la neige de printemps est généralement excellente », conseille Marlène Giacometti, rappelant que les Menuires resteront ouverts jusqu’au 19 avril.
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Raquettes
Du côté des stations de moyenne altitude, on ne se tracasse pas et on relativise aussi l’impact de Toussaint. « À ce jour nous sommes en retard mais cela ne m’inquiète pas », conjure Fabrice Mielzarek, directeur de l’Office de tourisme de Villard-de-Lans / Corrençon en Vercors (Isère). « Les gens ont peut-être encore en tête le déficit d’enneigement que nous avons subi l’hiver dernier. Mais si l’on regarde les chiffres dans le détail, notre période de Noël est en hausse et la machine repartira dès les premières chutes de flocons, nous avons une clientèle de proximité constituée à 75% de gens d’Auvergne-Rhône-Alpes », rappelle-t-il.
Il met aussi en avant une gamme de prix attractive à l’échelle des sports d’hiver, avec une évolution «maîtrisée» du prix des forfaits de ski alpin de 1€ seulement, et des souplesses tous azimuts pour déconnecter le ski du carcan «6 jours». Le professionnel rappelle aussi l’attrait du Vercors : les activités nordiques dont les très populaires raquettes à neige, une patinoire, un vaste centre nautique… « C’est le premier hiver pour lequel nous constatons un tassement du ski dans les activités prévues par les vacanciers », étaye Denis Maurer (G2A). 72% des partants à la montagne envisagent en effet le ski cet hiver. Ce chiffre n’avait jamais glissé sous le seuil des 81%.
En vidéo – La station de la Sambuy cesse l’activité ski en raison du réchauffement climatique